Dans le courant de l'été, je reçois un message de Jade me demandant si je suis dispo pour remplacer son coéquipier à la Collontrek. Le crénau est libre alors je me plonge dans le descriptif de la course et me réjouis vite à l'idée de courir sur glacier. Tout enthousiaste, je lui réponds tout de go par un OK.
On se retrouve à Martigny pour faire le reste du trajet en voiture jusqu'à Valpelline. Joli voyage par le col du Grand Saint-Bernard. Arrivés dans l'après-midi, on profite alors du soleil en dégustant des produits locaux (MIAM) avant une bonne petite sieste... On est arrivé un peu tôt au village de course. Le temps se fait long jusqu'à ce qu'on puisse (enfin) rejoindre notre charmant petit B&B. Le briefing et la pasta party sont prévus pour 18h et ce n'est qu'à 20h30 que les navettes nous emmènent à nos logements. On est alors accueillis par une gentille petite Mama italienne qui nous réparpille (on est 3 équipes à loger ici) dans les 3 chambres.
La nuit est excellente, le réveil à 5h45 facile, le ciel dégagé, on se dirige avec optimisme vers le petit déjeuner où la Mamma prend soin de nous à coup de marmelades maison, tarte et tout ce qu'il faut pour un bon réveil. On est attablé avec les 2 autres équipes. Un couple fera la course en mixte comme nous mais ils prennent le départ sur la touriste à 8h30. L'autre équipe, des fribourgeois seront sur le même départ que nous mais en équipe hommes. On échange un peu, mais léger, moi au réveil je suis pas des plus causeur.
Le bus est attendu pour 6h30. En short avec un petit collant sur les cuisses je fais intrus entouré de collants longs mais je déteste porter ces longs collants pour courir. Je l'évite autant que possible. Là il fait frais mais ce n'est pas insupportable. Une fois arrivé dans la zone de départ, quelques centaines de mètres plus haut (1600m), ça pique un peu plus mais ça reste faisable... On verra une fois au col ce que ça donne! J'ai de toute manière mon collant long dans le sac.
Avant de nous dégourdir les jambes, on se ravitaille avec un bon thé chaud à la buvette toute proche du départ. L'organisation nous averti que les 2 départs vont être retardés à cause des conditions météo au col qui ne sont pas aussi bonnes qu'ici. On prend notre mal en patience en sirotant notre thé, le soleil pointe gentiment le bout de son nez. Certains versants sont illuminés mais nous pas encore. On va trottiner au bord du très joli lac bleu turquoise. Plusieurs chutes d'eau parsèment les abords, c'est une mise en jambes plutôt sympa.
La catégorie randonneurs démarre les festivités à 9h au lieu de 8h30 et l'organisation répète qu'au col les conditions sont pas terribles, il y a des chance que l'on ne puisse pas passer. On reste positif.
Une demie heure plus tard c'est notre tour, on se positionne vers l'avant du peloton et c'est le départ! C'est ma première patrouille et je n'ai jamais couru avec Jade donc c'est la pleine découverte. Le début est plat sur presque 5km, au bord du lac. Le foehn nous permet de courir dans de bonnes conditions, il fait bon, le ciel est clair c'est génial. Arrivé au bout du lac, la montée débute, je reste devant Jade, tout va bien pour moi mais elle me dit que pour elle c'est pas génial. Le café italien ne passe pas très bien.
La montée commence en forêt et on rejoint rapidement un terrain plus alpin, entourés de glaciers plus haut, de rochers à notre niveau. On voit bien que notre course se dirige vers les nuages mais je garde espoir. Peut-être que leur annonce du départ peut évoluer selon la situation météo, on sait jamais.
Passé un bout plat, on arrive gentiment au 1er ravito. Je suis quelques pas devant Jade et profite de me prendre une banane et de demander à un membre de l'organisation si la situation a évolué. "On pourra passer le col finalement?" - "Aha non, les 1ers sont déjà arrivés à l'heure qu'il est!". Il me dit ça en rigolant mais moi, ça me fait pas rire du tout. J'espérais encore que ça change moi, surtout que côté italien il faisait si beau que j'avais de la peine à croire que ça ne s'améliore pas là-haut... On continue donc, mais un poil plus résigné. Jade, elle, reprend du poil de la bête et me lance qu'il nous faut absolument "passer cette cruche avec le top rose". Qu'on se le dise, les conditions de course peuvent vous changer un homme, ou une femme en l'occurence.
Donc là, je découvre que Jade en forme, c'est autre chose. Sur la montée qui suit le plat après le 1er ravito elle me montre qu'elle a des jambes. C'est vraiment cool. Cette montée raide, avec des câbles par moment, nous permet de reprendre pas mal de places et de recoller "la cruche".
Plus tard, Jade se reprendra un coup de mou. Je prends l'initiative de la pousser dans les montées (j'aurais adoré tester l'élastique dont elle m'a parlé avant la course, mais elle ne l'a finalement pas pris). Ca aide plutôt bien mais c'est pas toujours facile, moi je ne vois rien du parcours. Il faudrait s'entraîner.
On passe le deuxième ravito au refuge nacamuli. Jade veut que ça avance (le top rose est derrière mais ça chauffe) alors pas de pause, je prends une rasade de mon camelback et go. Jade passe devant, elle reprend vigueur dans la descente qui suit. On passe du monde à nouveau mais une sacrée montée nous fait alors face. Et là ça devient compliqué de la pousser. Le terrain est glissant, le chemin étroit ou technique par moment. Il aurait fallu mieux se connaître pour faire ce bout en se poussant. Dommage. En plus, le top rose et sa maman sont maintenant à nos côtés! J'ose pas regarder Jade qui doit bouilloner.
La météo devient de plus en plus difficile, on ne voit plus le soleil, le jour devient blanc petit à petit. Une fois en haut de cette montée, il fait quand même frais, le vent s'est levé et une bruime nous accompagne maintenant.
Une fois en haut, je pousse un peu sur mes jambes, je sais qu'on n'est plus très loin du Col et vu le terrain je ne peux plus pousser Jade. L'arrivée au Col se confirme, je passe le tapis finish et donne ma puce. Je retourne alors sur mes pas pour accompagner Jade sur ses derniers mètres. On termine officiellement 8ème équipe mixte en 2:12.25. Génial pour une première patrouille!
On ne traine alors pas trop là-haut parce que les conditions sont vraiment pas très sympa, il neige, il fait genre -5° et on voit rien du tout, jour blanc. Je suis tout triste de pas pouvoir continuer mais on comprend forcément la décision de l'organisation. Courir sur glacier ce sera pas pour cette fois. Il faudra qu'on revienne dans 2 ans!
S'ensuit la longue descente sur nos pas. Pas facile, on est un peu dépité, triste et ça fatigue ce genre d'émotions... Mais l'endroit est superbe et la météo reste super agréable côté italien. On arrive garder du plaisir.
Je me réjouis de pouvoir terminer cette course, je l'espère en 2017 avec la même coéquipière! L'organisation est très bonne, le logement super, la nourriture avant/après course très correcte. Franchement une course à faire!
Conditions trop dangereuses
Une fine pellicule de givre avait transformé les rochers en véritable patinoire et la visibilité sur le glacier que les participants doivent traverser en crampons était quasi nulle. Il n'était pas possible de voir d'une balise à l'autre et, en cas d'accident, aucun transport héliporté n'était possible, indiquent les responsables de la sécurité sur le parcours. Tous les participants ont dû rejoindre Bionnaz en sens inverse et sont rapatriés à Sion (VS) par bus
Le Nouvelliste du 05.09.2015